L’arrêt cardiaque causé par une relation sexuelle peut-il être un accident du travail ? La Cour d’Appel de Paris répond par l’affirmative !

La Cour d’Appel de Paris, dans un arrêt en date du 17 mai 2019[1], invoque le principe selon lequel le salarié est protégé pendant tout le temps de la mission qu’il accomplit pour son employeur. Pour rappel, le salarié est en mission en cas de déplacements occasionnels pour le compte de son employeur, ou encore lors de déplacements habituels inhérents à l’exercice de sa profession.

La protection du salarié est assurée que l’accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel, ou encore d’un acte de la vie courante. Or, il est de jurisprudence constante qu’un rapport sexuel est un acte de la vie courante. Le décès du salarié en mission professionnelle lors d’un rapport sexuel est donc imputable à l’employeur !

Ce dernier peut néanmoins s’opposer à la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident, en démontrant que le salarié a interrompu sa mission pour accomplir un acte totalement étranger à l’objet de celle-ci.

À l’origine, l’accident du travail tel qu’il est présenté à l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale ne prévoit que des accidents d’origine professionnelle, survenus « par le fait » ou « à l’occasion du travail ». C’est la jurisprudence qui a assoupli peu à peu ce critère, le caractère professionnel de l’accident étant soumis à l’appréciation souveraine des juges du fond. La récente décision de la Cour d’Appel renforce encore plus cet assouplissement.

On sait que l’accident du travail répond à quatre conditions, encadrées par la jurisprudence.

La première (1) est l’existence d’un fait accidentel : peu importe sa cause, il suffit qu’il survienne à une date certaine et qu’il soit soudain.

Il faut ensuite (2) qu’une lésion apparaisse. Elle s’entend au sens large, peut être physique ou psychique, et comprend par conséquent toute atteinte à l’intégrité de la personne.

L’accident doit quant à lui survenir à l’occasion du travail (3), le salarié devant se trouver sous l’autorité de l’employeur, ce qui est le cas lorsqu’il est en déplacement.

Enfin (4), un lien de causalité doit être établi entre l’accident et le dommage subi.

En l’espèce, la Cour d’Appel a estimé quant à la troisième condition (3) que rien ne prouvait que le salarié aurait « interrompu sa mission » pour accomplir un acte totalement étranger à l’objet de celle-ci, et le fait que cet acte intervienne dans un autre lieu que la chambre d’hôtel que lui avait réservée l’employeur, ne permettait pas de considérer que le salarié s’était placé hors de la sphère de l’autorité de l’employeur ! Une question se pose alors : quelle était la teneur de la mission du salarié ?

L’assouplissement des conditions permettant de qualifier les accidents du travail, et notamment cette récente décision de la Cour d’Appel de Paris, peuvent légitimement alerter les employeurs. Il s’agira donc de suivre les prochaines décisions sur ce point…

 

[1] CA Paris, Pôle 6 ch. 12, 17 mai 2019, n°16/08787

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